Faire face
Carol Williams, une jeune danseuse, est promise à un bel avenir avec Guy, son partenaire et fiancé, mais la polyomélite la fauche en plein envol. Sans garantie de pouvoir de nouveau danser, elle envisage avec peu d’enthousiasme la dure rééducation dans un établissement spécialisé…
Pour son deuxième film en tant que réalisatrice, tourné dans la foulée d’Avant de t’aimer, Ida Lupino fait appel au même couple de jeunes interprètes, Sally Forrest et Keefe Brasselle, trouvant dans la première une sorte d’alter ego rajeunie, comme elle à fleur de peau, et dans le second une figure masculine à la fois valeureuse et touchante. Quinze ans plus tôt, Lupino avait été atteinte de polyomélite : elle en garda peu de séquelles, mais il fut tout naturel qu’elle consacrât à cette question l’un de ses films, presque toujours centrés sur un problème sociétal — d’autant que, en tant que jeune actrice, elle avait éprouvé, comme sa protagoniste danseuse, révolte et incompréhension face au surgissement de cette maladie (dont une terrible épidémie commença aux États-Unis l’année de la réalisation du film). Pour plus de réalisme, Lupino tourna Faire face à l’Institut Kabat-Kaiser de Santa Monica, en Californie, une maison de convalescence pour malades de la polio ; nombre des patients qui figurent à l’écran en étaient de véritables résidents. « Ce qui intéresse la réalisatrice, c’est la description des relations, des sentiments, de la vulnérabilité des personnages, placés dans une situation qui leur paraît sans issue », écrit Jacques Lourcelles, ajoutant que « les histoires préférées d’Ida Lupino racontent la lente cicatrisation d’une blessure ». Ni film-dossier, ni récit édifiant de type « développement personnel », Faire face est un film vibrant, qui sait faire de figures a priori périphériques (telle la collaboratrice solitaire de Guy, lorsque celui-ci prend un nouveau travail après l’hospitalisation de Carol) des personnages précis et émouvants. Jean-François Buiré