Sérénade à trois
Deux américains partageant un appartement à Paris tombent tous les deux amoureux de la belle et spirituelle Gilda Farrell qui ne peut se décider entre les deux prétendants. Ils décident alors d’emménager tous les trois.
En 1933, Sérénade à trois adapte une pièce à succès, encore à l’affiche à Broadway et déjà légendaire. Paramount ne souhaitait rien d’autre qu’un emballage cadeau pour succès prêt-à-porter. Lubitsch, peu soucieux de livrer le produit commandé, fait totalement réécrire le sacro-saint dialogue de la pièce par un autre dramaturge, Ben Hecht, au point de n’en garder qu’une seule réplique !
Si Sérénade à trois trahit la brillance des dialogues d’origine, c’est pour donner la vedette au langage cinématographique. Un nuage de poussière qui s’échappe d’un lit, une clochette de machine à écrire qui tinte, deux tulipes perchées dans un pot offert par les deux soupirants de l’héroïne, et que le mari envoie valser d’un coup de pied rageur en pleine nuit de noces : visuellement, Lubitsch ironise ou s’attendrit, démolit ou transcende, et la subversion du propos se métamorphose en subversion du verbe par l’image. Sérénade à trois, c’est un Lubitsch de charme. — N. T. Binh