Noire, la vie méconnue de Claudette Colvin
En 2015, l'écrivain, journaliste, compositrice et chanteuse Tania de Montaigne a publié chez Grasset un ouvrage consacré à Claudette Colvin : une adolescente de 15 ans qui, dans l'Alabama ségrégationniste de 1955, refusa, 9 mois avant Rosa Parks et sur la même ligne de bus, de céder sa place à une passagère blanche. Un texte à la beauté poignante qu'on a pu entendre par la suite directement de la bouche de l'auteure, au théâtre, dans une mise en scène de Stéphane Foenkinos avec des films de Pierre-Alain Giraud. Le joyeux duo composé de Foenkinos et de Giraud ne s'est pas arrêté là puisqu'ils ont aussi réalisé, d'après le livre, une installation en réalité augmentée avec son auteure.
Equipé de lunettes de réalité augmentée et guidé par la voix de Tania de Montaigne, le spectateur plonge dans le Sud des Etats-Unis des années 50 et assiste, comme s'il y était, à l'événement qui a valu à Claudette Colvin d'être arrêtée et condamnée. L'expérience est multisensorielle : des archives et vidéos sont projetées sur un écran tandis qu'on évolue physiquement parmi les spectres holographiques des personnages de l'époque, prenant garde de ne pas leur rentrer dedans ni de marcher sur les magnifiques feuilles scintillantes de la flore américaine virtuelle.
Tania de Montaigne voit un avantage à présenter son livre en réalité augmentée : « La réalité ne disparaît jamais, elle est vraiment augmentée d'autres choses. Il y a cette idée d'un aller-retour permanent entre ces années 1950 et aujourd'hui. Si vous commencez à rentrer dans tout ça, vous allez pouvoir percevoir à quel point ce qui est raconté des années 1950 perdure d'une façon ou d'une autre, puisque le sujet est : « Comment est-ce qu'on décide que quelqu'un n'est pas quelqu'un ? ». On peut se retrouver à s'asseoir sur l'un des sièges, et une minute après, on se rend compte qu'on est dans le bus derrière Claudette Colvin ». Cette exposition est une sorte de laboratoire dans lequel on ferait dialoguer tous les arts autour de l’histoire de Claudette Colvin.